Témoignage de Sr Marie Thérèse, la dernière venue depuis 10 ans, de France, pour la mission au Cameroun


C’est en août 2007 que la Congrégation m’envoyait au Cameroun, à la communauté de Bafoussam, pour rendre quelques services.

Sr Marie Thérèse

Sr Marie Thérèse

Le premier contact avec ce pays que je ne connaissais pas a été très positif. Certes, une pluie battante m’a accueillie et j’ai vu comment les gens, portant sur leur tête des cuvettes pleines d’arachides, s’entassaient pour se mettre à l’abri.

Arrivée à la communauté de Bafoussam, j’ai senti au fond de moi que c’était bien là que je devais être : la calme de la maison dans son cadre de verdure, les fleurs, le plumage des oiseaux aux couleurs vives, leur chant dès le lever du jour et au coucher du soleil, les messes à la paroisse animées, chantantes et dansantes même en semaine, tout cela m’a conquise.

Mais quelles différences avec le pays que je venais de quitter. Comment m’orienter sans carte, sans plan de la ville, sans boîte aux lettres à chaque porte ? Tel sentier, où me mènera-t-il ?

Je rends grâce au Seigneur pour toutes les personnes qui m’ont aidée à faire les premiers pas. Les novices m’ont « sortie » et fait prendre des chemins boueux et passer sur un pont en bois où il fallait être attentif pour ne pas mettre le pied dans le vide, le cours d’eau était en-dessous. Un ami de la communauté m’a fait connaître des malades à visiter et m’a accompagnée jusqu’à ce que je repère bien les chemins. Puis un jour, le Curé de la paroisse de Koptchou m’a demandé si je voulais aider au secrétariat paroissial.

Pourquoi pas ? Je n’avais jamais travaillé dans ce domaine, j’avais tout à apprendre du fonctionnement d’une paroisse. J’ai fait équipe avec la personne qui était en poste. J’ai admiré sa patience pour m’initier. Nous avons travaillé ensemble plusieurs années jusqu’à ce qu’il quitte ce poste et me laisse naviguer seule.

C’était les débuts de l’aventure. En 10 ans les choses ont évolué. Le pont en bois a été reconstruit solidement, l’église bâtie par les Pères missionnaires Xavériens attendait un revêtement de sol et un plafond. Ces travaux ont été effectués. Le Foyer qui servait de chapelle provisoire avant la construction de l’église a aussi été aménagé de même la cour de la paroisse s’est embellie de pavés, d’un clocher qui se repère de loin et d’espaces verts qui agrémentent la beauté du site.
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Et aujourd’hui, où en sommes-nous ? Si les activités restent les mêmes, la réalité quotidienne réserve ses surprises. Les permanences au secrétariat continuent chaque jour. Les services à rendre sont variés : accueillir, écouter, consoler parfois, renseigner, établir des dossiers pour les sacrements, inscription pour la catéchèse, demandes de Messe etc. Ce service demande un bon suivi, du sérieux dans la comptabilité et une franche collaboration avec le Curé et son clergé. C’est la confiance mutuelle qui est notre force.

Autre volet de mes activités : la visite des malades à qui je porte la communion. C’est un apostolat qui ne fait pas de bruit mais qui est vital pour ceux que l’on visite. Cela fait entrer dans les quartiers, rencontrer les gens sur la piste, les saluer, dire un petit mot. Pour les malades, c’est important que le jour de la visite soit fixe. Une dame me disait récemment qu’elle aime se reposer le matin, rester au lit mais le jour de la visite, elle se lève tôt et se tient prête comme pour un rendez-vous. Le contenu de la visite varie avec chaque personne. Le temps de la prière peut-être sobre ou ressembler à une célébration avec partage de la Parole de Dieu, chants, joie et soucis familiaux partagés. Les gens sont très touchés que l’on vienne les voir chez eux, tout simplement. Toute la famille se sent mobilisée.
Depuis le début, je visite un jeune. Il est paraplégique suite à un accident à l’âge de 19 ans. Voici son témoignage :

article_marie_threse_b_2017.jpg « Après mon accident, je passais des moments seul. J’ai eu le désir de recevoir le baptême. La Sœur Marie Thérèse a commencé à me rendre visite pour me faire la catéchèse et m’a accompagné vers mon baptême. Puis les visites ont continué. Une fois par semaine elle m’apporte la Communion. Nous partageons notre vécu. Elle est devenue plus proche, c’est un plaisir à chaque fois. Je la porte dans mon cœur, elle est importante pour moi. Je suis content de l’avoir rencontrée et d’avoir fait sa connaissance »

Une autre activité est le soutien scolaire. En général il permet aux enfants de ne pas redoubler la classe. Depuis 2 ans je fais de l’alphabétisation à une jeune de 22 ans. Elle est handicapée de naissance au niveau des jambes et se déplace en portant des prothèses. Ses parents ont beaucoup lutté contre le handicap mais ne l’ont jamais envoyée à l’école. Elle se sentait coupée du monde, elle avait envie d’apprendre à lire mais n’arrivait pas à en prendre la décision. Elle s’est inscrite à la catéchèse et retenait tout dans sa mémoire, ne sachant ni lire ni écrire. C’est en 3ème année de doctrine qu’une Sœur de ma communauté l’a reçue dans son groupe. Elle avait honte de sa situation. La Sœur lui a demandé si elle voulait apprendre à lire et me l’a fait connaître. Cette jeune qui parle très bien le français, fait des progrès merveilleux en lecture et en écriture. Le temps que je passe avec elle est un vrai bonheur, toute sa famille participe à ses progrès et elle est fière de savoir écrire son nom, de connaître l’alphabet et lire seule des mots et des phrases.

Chacune de nous dans sa mission peut dire les mêmes choses et même davantage. Ce que j’ai compris au fil des années c’est qu’il ne faut pas faire de comparaisons entre son pays d’origine et le pays d’adoption. Chaque continent a ses richesses et ses difficultés. L’important c’est de vivre de son mieux là où la mission nous envoie et de rendre grâce au Seigneur des merveilles qu’il met dans le cœur de chacun.

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